La clause bénéficiaire du contrat d’assurance-vie, comme expliqué dans l’article L’assurance-vie, a de nombreux avantages successoraux.

Cependant il est important de la manier avec soin pour éviter les erreurs. Il existe différents types de clauses :

1/ La clause standard

Par défaut, c’est la clause qui s’appliquera dans cet ordre ;

Le conjoint ; à défaut mes enfants nés ou à naître, vivants ou représentés ; à défaut mes héritiers.

Le bénéficiaire de premier rang est donc le conjoint, puis s’il n’est plus là, les enfants par parts égales. Les termes « vivants ou représentés » signifient qu’en cas de prédécès de l’un des enfants, si ce dernier a lui-même des enfants, ils pourront venir en représentation du défunt. Il se partageront ainsi les capitaux à parts égales.

Pour finir, les clauses se terminent toujours par « mes héritiers ». Ces termes permettent à l’assureur, en cas de prédécès de l’ensemble des bénéficiaires, d’aller chercher le plus proche héritier pour lui transmettre les capitaux.

« Il est préférable d’opter pour des clauses nominatives, cela permet d’accélérer le versement des capitaux aux bénéficiaires.

C’est d’autant plus important si le reste du patrimoine est fortement immobilisé car les liquidités seront nécessaires pour payer les droits de succession. »

La clause standard est la plus répandue, souvent par méconnaissance, mais peut entrainer des conséquences dommageables.

Pour comprendre ces conséquences, il faut rappeler que depuis la loi TEPA (Travail Emploi et Pouvoir d’Achat) de 2007, les conjoints survivants n’ont pas de droits de succession sur le patrimoine successoral de leur conjoint défunt.

Si vous avez bien compris l’article sur l’assurance vie, vous voyez certainement venir les conséquences.

La clause standard du contrat désignant en premier lieu le conjoint mais ce dernier étant déjà exonéré de droits par la loi TEPA, les abattements de l’assurance-vie sont perdus inutilement.

Pire encore, dans la pratique, on retrouve souvent ces capitaux qui auraient pu être transmis sans droits directement aux enfants ou à un tiers, se voir appliquer des droits de succession car le conjoint âgé bénéficiaire ne les a pas utilisés faute d’utilité.

Pour optimiser vos droits de succession, il est donc important que cette clause soit modifiée dans le temps, en fonction des besoins, vers des bénéficiaires autre que le conjoint.

La clause peut apporter des atouts indéniables surtout lorsque l’on sait que le taux d’imposition au barème du CGI (Code Général des Impôts) pour des frères et sœurs est de 35% et de 60% pour des parents au-delà du 4ème degré.

« Il sera toujours préférable fiscalement de faire bénéficier votre contrat à vos enfants, petits-enfants ou personnes tiers plutôt qu’au conjoint.

Cependant, il faut, dans certains cas, tenir compte de la nécessite de protéger son conjoint ayant des plus faibles revenus. »

Nicolas Dadoun, associé gérant Must Finance

2/ La clause démembrée

Le démembrement d’une clause bénéficiaire permet d’apporter simultanément protection du conjoint et optimisation de la transmission.

Il est fortement conseillé de se faire accompagner pour sa rédaction, car celle-ci se révèle beaucoup plus complexe.

Le démembrement, à l’instar de l’immobilier, permet de séparer la nue-propriété (titre de propriété du bien) et l’usufruit (droit de jouissance du bien et de ses loyers). Le schéma fiscal beaucoup plus connu sur l’immobilier peut aussi être appliqué sur une clause bénéficiaire.

Les enfants, au moment du décès de l’assuré, se retrouveront donc nus-propriétaires des capitaux et le conjoint usufruitier.

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La question de la jouissance d’un bien ou de ses loyers sur l’immobilier parait facilement compréhensible, mais qu’en est-il des capitaux qui sont par nature consumptibles. 

L’usufruitier ne pouvant user de son droit qu’en « mangeant » les capitaux dont il est le bénéficiaire, c’est ce qu’on appelle un quasi-usufruit.

Quid du nu-propriétaire qui est censé recevoir la totalité des capitaux au moment du décès du conjoint survivant ?

Pour rappel, comme vu dans l’article démembrement, au moment du décès de l’usufruitier, l’usufruit rejoint la nue-propriété sans droit pour réformer la pleine propriété. Pour faire respecter ce droit, au moment du premier décès, on va constater une dette du conjoint vis-à-vis des nus propriétaires : c’est ce qu’on appelle la créance de restitution. 

Cette créance se retrouvera au passif de la seconde succession pour éviter que les capitaux ne soient taxés une deuxième fois. 

Trois cas sont possibles au moment de la transmission

1/ Le conjoint n’a pas utilisé les capitaux dont il est l’usufruitier bénéficiaire : les nus-propriétaires récupèrent donc ces capitaux sans payer de droits.

2/ Le conjoint a utilisé partiellement ou totalement les capitaux dont il est l’usufruitier bénéficiaire mais possède du patrimoine propre. Les enfants récupèrent les capitaux restants et appliqueront sur la succession la créance de restitution pour « se servir » sur le patrimoine successoral. 

3/ Le conjoint a utilisé totalement les capitaux dont il est l’usufruitier bénéficiaire et ne possède plus de patrimoine propre. Les enfants ne pourront pas appliquer leur créance de restitution et ne pourront donc bénéficier des capitaux décès. Ils se retrouveront donc lésés.

Ainsi, la clause bénéficiaire permet de protéger son conjoint, en lui assurant un matelas de sécurité sur une partie ou la totalité des capitaux de l’assurance-vie, tout en préparant la transmission des enfants pour optimiser leurs droits. Elle doit donc être personnalisée pour répondre aux besoins et au patrimoine de chacun.

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